vendredi 31 mai 2013

Compagnies légères et Petite Guerre - Light compagnies and Petite Guerre



Les troupes légères françaises dans la seconde moitié du XVIIe siècle

The French light troops in the second half of the seventeenth century



Ci-dessus : fantassins français selon Jacques Callot - French foot according to Jacques Callot.

Il ne faut pas attendre le XVIIIe siècle pour voir se développer la guerre de campagne, ou petite guerre. Sans remonter à l'antiquité, ni aux Stradiotes albanais du moyen-âge, on peut relever quelques corps réglés, créés spécifiquement pour les combats d'escarmouche, dès le XVIe siècle. Ce fut le cas des dragons du maréchal de Cossé Brissac en 1543, des trois compagnies d'Arquebusiers à cheval qu'on nommait Dragons au début du règne d'Henri IV ou encore des deux compagnies de gardes du Connétable de Lesdiguières levés en Dauphiné et armés de carabines pour combattre en enfants perdus. Brantôme nous évoque aussi « Guise, le Balafré, qui souhaitait avoir dans ses Ligueurs des montagnards et des hommes du midi, légers de chair, dispos, bien ingambes, armés de dagues et d'arquebuses légères, fournis en poudre fine et départis en quatre ou cinq bonnes bandes ou quelquefois par escouades ». 
Puis le XVIIe siècle voit une utilisation intensive des formations d'enfants perdus dont Louis XIII, dans son règlement de 1638 pour son régiment des Gardes, précise l'utilisation : « Si l'on envoie des enfants perdus, on les fera commander par le nombre d'officiers et de sergents nécessaires, pris à des compagnies différentes. Un sergent marche d'abord avec douze à quinze mousquetaires. Trente ou quarante mousquetaires marchent sous un lieutenant et un sergent. » Mais ce sont surtout les nombreuses compagnies franches, qui existent déjà en 1617, et les régiments de dragons, avec le régiment d'Adjous dès 1622 puis les six régiments créés par Richelieu en 1635, qui sont en charge de ce type d'opération. Pour leur part, les armées de l'Empire utiliseront des Croates en grand nombre aux côtés de quelques unités de dragons et de hayduks hongrois. Français et Espagnols engageront ensuite à leur tour quelques régiments de Croates. Puis, le 28 décembre 1652, le maréchal d'Hocquincourt fut autorisé à lever, en Roussillon, un régiment à dix compagnies composé d'hommes armés de fusils ou de mousquets et sans aucun piquier. Enfin,  la seconde moitié du XVIIe siècle verra le nombre de compagnies franches se multiplier et la guerre de succession d'Espagne sera le théâtre des exploits des compagnies franches de De la Croix, Dumoulin ou Jacob.
Le nombre de compagnies franches de fusiliers et de dragons est déjà important au début du XVIIe siècle : on en compte 78 en 1617, de 35 hommes chacune, puis 149 compagnies en 1644. Leur rôle est à cette époque de soumettre les régions frontalières ennemies à contribution et de défendre ses propres frontières contre les partis ennemis. Il existe alors des partis réguliers et des partis bleus. Un parti régulier doit être composé de plus de 14 hommes et être en mesure de présenter un document signé des autorités. Les partis bleus, qui comptent moins de 15 hommes et ne peuvent présenter de tels documents, sont considérés comme brigands et voleurs de grands chemins.
Il existe 160 compagnies franches en 1675, dans le Nord et l'Est de la France. De plus, il avait été levé, en 1674, trois compagnies de miquelets : une dans le Béarn, comptant 60 hommes, et deux dans le Roussillon, comptant 40 hommes chacune. Neuf autres seront créées en 1675. À partir de cette année là, l'effectif d'un parti ayant autorisation de soumettre à contribution doit être au minimum de 19 fantassins ou 15 cavaliers. 
La guerre de la Ligue d'Augsbourg voit ces compagnies franches reprendre du service, l'effectif d'une compagnie pouvant varier de 30 à 100 hommes. Selon Victor Sapin-Lignieres, l'effectif de l'ensemble des compagnies franches est de 5 270 hommes en 1692 puis 8 600 hommes, en 1694, en 129 compagnies : 55 compagnies franches de 100 fusiliers (dont 2 allemandes et 3 anglaises), 26 compagnies franches de 50 fusiliers, 46 compagnies de 30 miquelets, 2 compagnies d'Alsace de 60 hommes. L'année 1695 voit la création de régiments de frontières composé de déserteurs partis à l'étranger et désireux d'obtenir un pardon. Six régiments sont ainsi créés comptant un ou deux bataillons de 12 compagnies de fusiliers plus une de grenadiers. Deux de ces régiments, ceux de La Croix et de Guiscard sont formés autour de compagnies franches déjà existantes. En 1696, régiments de frontières et compagnies franches réunissent un peu moins de 16 000 hommes.
Les compagnies franches vont réapparaître avec la guerre de Succession d'Espagne. La Croix reprend alors du service : il est autorisé, le 12 avril 1701, à lever une compagnie de 200 fusiliers et 8 officiers. Le 8 décembre, une compagnie de dragons est créée. En 1703, ce corps qui compte maintenant 300 fusiliers et 150 dragons a déjà beaucoup d'exploits à son actif. Beaucoup d'autres compagnies seront créées pendant cette même période, comme celles de Mélard, de Baratier, de Palmerolles, de Dumoulin, de Jacob, de Pasteur, de Kleinholdt ou encore de Chateauford. Grandmaison nous a rapporté plusieurs exploits de la compagnie de  Dumoulin. 
En voici un exemple : 
« Dans la guerre de 1700, Mr Dumoulin étant en course avec un gros parti, dans un moment où l’armée des alliés talonnait la nôtre de trop près, s’embusqua à cinq cents pas d’un chemin creux, où devait nécessairement passer la colonne d’équipage des ennemis, à la suite de l’armée. Quand celle-ci eut défilé, & que la tête du bagage, quelque temps après, fut engagée bien avant dans ce chemin, Mr Dumoulin tomba dessus à l’improviste, battit la tête de l’escorte, la mit en déroute, fit tuer les chevaux des premiers chariots, & mettre le feu à quantité d’autres voitures, ce qui causa un si grand désordre & une si grande confusion dans toute cette colonne d’équipage, que l’arrière-garde des alliés rétrograda pour venir à son secours. Le corps de l’armée fit halte, perdit une demi journée de marche pour rétablir son bagage, & l’armée de France gagna l’avance. Mr Dumoulin se retira tranquillement à l’approche des ennemis, avec la gloire d’avoir bien exécuté la commission dont son général l’avait chargé. »
Plus de 190 compagnies sont ainsi créées dans les seules années 1702 et 1703. Dans le même temps, les effectifs de ces compagnies franches augmentent. Celle de La Croix passe à 17 officiers et 450 fusiliers début 1706. Le régiment des Fusiliers de Montagne, formé en 1703 dans les Cévennes passe à 2 bataillons de 12 compagnies en 1705. Puis en 1713, de nombreuses compagnies franches sont incorporées dans des régiments ou licenciées. Les dernières compagnies franches seront licenciées en 1716.

Ce texte est extrait de différents passages de mon ouvrage Les Troupes Légères de Louis XV, désormais épuisé, mais que vous pourrez trouver disponible en version numérique, ici.

This text is extracted from various parts of my book The Light Troops of Louis XV, now unavailable. But it can be found here in digital form (pdf). Available only in french.




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